Roland SH3a

Avant de commencer je tiens à préciser que je ne parlerai pas de composants, de transistors et autres circuits: je n’y connaîs rien. Je vais (tenter) de vous expliquer les fonctions, ce qui se passe et comment ça sonne.

Je vais donc vous parler un peu du Roland SH3a. Une rapide présentation du bestiau: synthétiseur monophonique sous format « valise », sans doute destiné à accompagner un orgue, comme beaucoup de ses compagnons de l’époque. Il ne paye pas de mine, mais vous allez voir qu’il recèle pas mal d’astuces et de caractéristiques particulières qui en font un excellent petit clavier !

Caractéristiques rapides: 1 VCO à octaves et formes d’ondes multiples, 1 noise (white ou pink), 1 VCF, 2 LFO, 1 sample & hold (nommé sampler), 1 VCA, 1 ADSR éditable + des présélections d’enveloppes, portamento. Clavier de 39 touches (pas trop pourri), trigger simple avec priorité à la note la plus basse. Voilà en gros.

Esthétiquement parlant, je trouve ce clavier absolument fascinant. La disposition de toutes les commandes à gauche (ça fait un peu Oberheim SEM), la couleur bleue-gris, les boutons et potards à capuchons chromés etc… On sent de suite qu’il fait partie de la première génération de synthés « combos », sortis dans la 1ère moitié de 70’s. Il fait vieux, plus vintage qu’un MS20 ou un Jupiter 8, si, c’est possible. On sent que les modulaires n’étaient pas encore très loin. C’est simple j’ai flashé dessus directement la première fois, juste visuellement.

Maintenant rentrons plus avant dans le détail, en commençant par les LFO.

Les 2 LFOs et une vue d’un des switchs de sélection d’onde (ici le VCO).

Oui, vous avez bien lu, on a à disposition 2 LFO distincts. Le premier produit une onde en dent de scie descendante. Un contrôle de la vitesse et c’est tout.

Le second est un peu plus complet car il fournit 2 ondes, sinus et carré. On dispose pour celui-ci du contrôle de vitesse et d’un réglage de délai d’entrée en action (qui donne aussi un effet de fade-in, sympa). La plage de fréquences de ces 2 LFO reste, disons, dans les normes: ça ne monte pas très vite (genre FM), et ça ne descends pas non plus à des cycles de 1 minute. Je ne connait pas les cycles en Hz, mais j’aurai aimé que la plage de fréquence soit un peu plus large. Bon, ça fait le job quand même.

Donc jusque là rien d’extraordinaire me direz vous. Oui, mais non ! Car l’astuce c’est que, comme sur les Yamaha CS, on ne choisit pas une bonne fois pour toute la forme d’onde d’un LFO dans ledit module, non ! On choisit l’onde au niveau de la destination de modulation !!! Donc, pour chaque section concernée (VCO, VCF, VCA et, on le verra, SAMPLER) on a le choix entre les 3 ondes fournies par les 2 LFO, et ce indépendamment pour chaque section. On peut donc choisir le sinus sur le VCO, le carré sur le VCF, et la dent de scie sur le VCA,tout ça en même temps, no problemo ! Et là vous comprenez que les possibilités de modulations et d’interaction des LFO 1 et 2 sont carrément sympathiques et permettent de lancer un son dans les étoiles très facilement ! Une des armes secrètes du SH3a !

Passons maintenant au VCO. Là encore Roland nous propose un module un peu particulier. En effet nous disposons d’un unique VCO, mais celui ci à le bon goût de délivrer en même temps un panel de 5 octaves (32′ / 16′ / 8′ / 4′ / 2′) dont on va pouvoir régler les volumes grâce à 5 potards linéaires. Un peu à la façon d’un orgue donc. Et en plus, comme si ça ne suffisait pas, on a le choix entre 3 formes d’ondes (carré, rectangle et dent de scie) indépendamment pour chaque octave ! Autant vous dire tout de suite qu’avec tout ça on arrive déjà à une variété de sonorités très étendues avec un simple et unique VCO ! Les formes d’ondes carrés sont particulièrement puissantes dans les basses. Le rectangle donne de très beaux sons de bois (attention aux medium). La dent de scie me déçois un peu, elle semble étriquée et n’a pas énormément de patate. Mais elle reste très utilisable tout de même. N’empêche, moi qui ne suis pas un grand fan de la forme carrée d’habitude, là je me régale !

Et c’est pas fini. Au dessus des 5 octaves on trouve un potard 8′ CHORUS. Celui ci est en fait un effet PWM de l’octave 8′. Plus on tourne le potard, plus la modulation accélère. Pour ce que j’en ai vu, cet effet fonctionne sur les 3 ondes, pas uniquement sur le carré. Cette fonction est très importante car, bien qu’on ai un choix d’octaves et d’ondes déjà intéressant, notre son reste pour le moment droit, sans détune, sans mouvement. Grâce à ce chorus on va pouvoir épaissir tout ça et faire comme si le SH3a avait plusieurs VCO (disons 2…). Combiné aux octaves ça commence sérieusement à donner de belles choses ! Pour finir on arrive à la section vibrato qui, comme son nom l’indique, nous donne accès aux modulations, avec un potard de réglage du taux de modulation, et le petit sélecteur des formes d’ondes des LFO (voir plus haut). La plage de modulation permet des balayages de fréquences assez important, du subtile vibrato aux modulations plus fofolles ! Ce module VCO est donc assez particulier et permet des choses très étonnantes pour un mono-VCO !

Le VCF. Module indispensable si il en est, je vous le dis tout de suite, il sonne terriblement bien ! Je ne vous faits pas de comparaison « ça sonne Moog ou Oberheim ou blablabla… », je n’ai pas essayé assez de synthés pour le faire. Mais il sonne gros. Plus brute de pomme que mes Yamaha CS en tout cas. Il entre en auto-oscillation si on veut, et c’est mon 1er synthé qui permet ça, et c’est génial (ah non, j’ai un Monotron aussi…)! Vive les FX de l’espaaaaace ! Par contre on perd énormément et rapidement en volume quand on pousse la résonance, un soucis répandu sur bien d’autres filtres il me semble. Au niveaux des commandes, on dispose des classiques réglages de fréquence et de résonance, d’un potard pour doser la sensibilité à l’enveloppe et au dessus le sélecteur d’enveloppe. Arrêtons nous sur celui ci un moment car il s’agît d’une petite astuce qu’on va retrouver également dans la section VCA.

Les presets d’enveloppes: à gauche le VCF, à droite le VCA.

Ce potard de sélection nous donne à choisir entre l’ ADSR classique et éditable du synthé, et 2 « presets » d’enveloppes (3 pour le VCA), non modifiables. Le premier preset est une enveloppe à attaque douce mais rapide (pas ON/OFF), sustain au max, et release court, bon pour les leads. Le 2ème est une enveloppe à attaque courte et decay court, sans sustain, idéal pour les sons percussifs. Comme on y est, le 3ème preset disponible pour le VCA est une enveloppe de type Gate, ON/OFF, tel un orgue. Ce système permet de palier à l’unique ADSR du synthé et nous permet de concocter des sons un peu plus complexe qu’en ayant une unique enveloppe générale pour tout le synthé.

Pour finir avec le filtre nous arrivons au potard de modulation GROWL. Comme pour le VCO, on dose le taux de modulation et on choisis sa forme d’onde. Le taux de modulation est à peu près équivalent au VCO, càd très suffisant pour de beaux effets bien prononcés. Avec la résonance à fond, miam les FX ! A noter aussi qu’il réagît au suivie de clavier, mais que celui ci est fixe et non éditable.

Un très bon filtre au final.

Passons au VCA. Pas beaucoup de surprises ici. On commence par un potard rectiligne qui règle son gain général. On poursuit par un potard Hold qui, comme son nom l’indique, nous permet de laisser plus ou moins ouvert le VCA quand on ne joue pas. Idéal pour laisser tourner une basse ou un effet en tâche de fond.

On trouve au dessus le même sélecteur d’enveloppe que pour le VCF, avec ces 3 presets cette fois ci. Viennent ensuite les réglages de modulations, identiques aux VCO et VCF. Sans surprise donc.

On va tout de suite parler de l’ADSR car il n’y a pas grand chose à dire, si ce n’est que les temps A, D et R ne permettent pas des choses très lentes comme j’aime. Je trouve les réglages rapides assez…rapides ! Voilà.

Je fait un rapide retour sur le côté gauche pour parler du noise. On trouve un potard pour régler son volume, un sélecteur White et Pink, et un second sélecteur qui permet de router le noise soit dans le filtre, soit directement dans le VCA sans passer par la case filtre, soit de le muter. La présence de ce noise est parfaite compte tenu de toutes les possibilités de modulations de la machine: vive le vent et vive les percus !

Je reviens sur la droite pour vous parler de la section VCO Manual control. On a ici les réglages commun du VCO tel que le Tune général du synthé, le Portamento, un sélecteur Transpose qui décale le clavier de + ou – 1 octave en haut et bas (ceci cumulé aux différents octaves du VCO, bonjour les infra basses et les grands aiguës !). Le portamento a un effet assez joli. On découvre aussi 2 petits boutons poussoirs rouge nommés Glide et Off.

Le premier est une sorte de pitch bend primaire qui actionne une montée de note (+ ou – 3 tons) à chaque pression. Pas de descente, pas réglable, pas très utilisable pour moi.

Le second bouton Off désactive le portamento tant qu’il est enfoncé. C’est très pratique pour apporter de la vie dans un solo par exemple.

Et je vous ai gardé le meilleur pour la fin: la section SAMPLER. Alors là on s’accroche car c’est pour moi ici le morceau de bravoure du SH3a. En exagérant à peine ce module pourrait expliquer à lui tout seul l’achat de ce synthé !

On trouve tout d’abord un sélecteur de la forme d’onde de modulation:

– OFF: module inactif

– Triangle du LFO 2

– Dent de scie ascendante du LFO 1

– Dent de scie descendante du LFO 1

– Random

Viennent ensuite les réglages de taux de modulation et de vitesse du sampler. Oui, car la vitesse de modulation ici est indépendante de la vitesse des 2 LFO. On dose donc le taux de modulation par le sampler. A zéro aucune modulation, mais l’enveloppe est déclenchée quand même, ça a son importance (voir plus bas). On dose la vitesse de modulation, ou de sample si on veut. Avec la forme random on obtient le classique S/H aléatoire. Mais avec les formes d’ondes des 2 LFO, on croise la vitesse de ceux ci et la vitesse du sampler, et on obtient soit des effets d’escaliers qui ressemblent à un arpégiateur fou, soit des modulations pseudo-aléatoires dans lesquelles on perçois tout de même des cycles, pas totalement chaotique comme le random. Plutôt que de vous faire des grandes phrases sur ce qui se passe avec ce module, je vais essayer de faire simple. Donc que ce passe t’il quand on met en route ce sampler du diable:

– le clavier est désactivé: impossible de jouer une note ou quoi que ce soit, le sampler prends la main. Il choisis une note de base et s’y tient. Apparemment c’est la note la plus basse du clavier. Le sampler ne fait donc pas office de modulation classique tel que les LFO. Il est clairement destiné à l’expérimentation, et ça c’est chouette !

– le VCO est modulé

– le VCF est modulé (aaahhh, l’auto-oscillation…!)

– l’enveloppe ADSR est triggée par le sampler, à sa vitesse donc. Attention, les presets d’enveloppe ne sont pas triggés eux !

– toutes les modulations par les 2 LFO et l’ADSR reste disponible et totalement contrôlables dans chaque section ! Encore une fois, vive les interactions de modulations !!!! Vous vous souvenez, l’arme secrète des LFO, il est là le gros point fort !

– le portamento agît toujours à chaque déclenchement de l’enveloppe. Suivant les réglages le son va se mettre à monter dans les aiguës progressivement…

Au bout du compte, nous qui pensions avoir à faire à un bête S/H des familles, nous voilà en présence d’un puissant système de modulations en tout genre, à la limite du monde modulaire (je sais, je m’emballe…), tout ça sur un petit clavier qui ne payait pas de mine au début. Vous vous en doutez, cette section sampler est ma préférée du SH3a, c’est une source inépuisable de bidouilles en tous genres. J’ai essayé un jour rapidement le module Sample & Hold d’un ARP2600 (merci MOS-LAB / Seb) et, bien que tout de même moins puissant, celui du petit SH3a n’a pas du tout à rougir face au monstre américain. Je l’utilise personnellement beaucoup avec l’auto-oscillation du filtre et le noise. Je regrette une chose: j’aurais voulu un switch de sélection de la destination de modulation. VCO / VCO + VCF / VCF.

Pour finir une petite photo du panneau arrière:

A suivre… J’essaierai de mettre du son pour chaque section 😉

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