Korg 800DV

Synthèse Soustractive Analogique (circuits discrets)
Polyphonie Duophonique
Mémoires Aucune
Année de construction 1975
Interface Modification CV-Gate possible

 

Le Maxikorg est un synthé fabuleux…

…D’abord par ses sonorités envoûtantes, extrèmement dynamiques, et d’une palette exceptionnellement large: il peut aller de la plus suave rondeur à la plus extrème acidité.
Son secret: comme sur les 700, 700S 770 et MS20: ses filtres actifs Passe-haut et Passe-bas en série.
Par bien des côtés, le 800DV peut être considéré à juste titre comme deux 700S en parallèle: les ‘circuits intégrés’ des VCOs et des VCFs sont les mêmes.Il s’agit en fait de gros pavés de résine noire de 5 cm de côté dans lesquels sont noyés dans le plus grand secret des composants discrets. Rien à voir, donc, avec les fameux ICs issus des progrès de la miniaturisation grand public vers la fin des 70’s.
Les EGs sont différents, quoique tout aussi noirs et carrés. Les VCAs diffèrent aussi, ce qui suffit sans doute à expliquer la différence de sonorités entre les 700 et les 800.
La gestion du clavier duophonique permet plusieurs modes de priorité, afin d’assigner les deux canaux à la première ou deuxième frappe de plusieurs façons possible.
Il peut aussi fonctionner comme un monophonique à 4 VCOs.

Côté construction, c’est un véritable tank! Le bois n’est là que pour faire joli: quand on le retire, on trouve dessous une véritable ‘double-coque’ en acier galva de 5/10è, ce qui en fait un engin assez lourd à transporter.
La finition particulièrement luxueuse des abords du panneau avant, doublés d’une sorte de tolex très résistant à motifs tissés, en fait un véritable objet de fascination.
Le clavier n’a rien d’exceptionnel: toucher correct sans plus.
Une particularité notable et particulièrement intelligente: les faders donnent le maxi EN BAS et le mini EN HAUT, ce qui peut paraître une bizarrerie d’un point de vue symbolique, mais se révèle beaucoup plus précis et adapté à la préhension lors de mouvements rapides.
On trouve à l’arrière, outre la connectique, une trappe pour ranger le cordon d’alim: Il s’agit bien, comme la robustesse de sa construction le laissait supposer, d’une machine de scène destinée à voyager beaucoup.

Voyons le détail du panneau avant. rappelons-nous que les deux circuits parallèles sont rigoureusement identiques.
Visite de gauche à droite:

ACCORD
Coarse tuning
Fine tuning

FILTRES
Fader Passe-bas
Fader Passe-haut
Switch 3 positions Bright
Switch 3 positions Expand
Les capuchons de faders sont équipés d’un ergot qui empèche de Passe-haut de ‘doubler’ la position du Passe-bas.
Ca peut paraître une limitation, et on peut être tenté de sectionner ces deux petits ergots.
En pratique, les deux filtres sont parfaitement conçus et calibrés pour fonctionner de concert, et lorsque le Passe-haut double le Passe-bas, on n’obtient rien d’autre qu’une diminution notable du volume.
Inutile donc d’outrepasser le choix du constructeur pour obtenir un son d’une extrème ‘maigreur’: le Passe-haut a un effet absolument radical!

Le switch Bright remplace le traditionnel potar ‘peak’ ou ‘resonnance’. Il y a juste trois positions présélectionnées :’rien’, ‘un peu’ et ‘à donf, caramba!’. Cette dernière position ne permet toutefois pas l’auto-oscillation des filtres.
Ces filtres sont au passage d’un type tout à fait particulier: ils exploitent la faculté qu’ont les diodes au germanium d’exercer une résistance variable dans un circuit selon la tension qui leur est appliquée. C’est pourquoi on les appelle typiquement ‘filtres à diodes’.
Notons que le switch Bright agit simultannément sur les deux filtres.
Renseignements pris auprès de M. Yves Usson, kador en électronique de son état, il est possible de remplacer les switches par des potars rotatifs pour un contrôle plus fluide de la résonnance.
En modifiant la valeur d’une résistance, on peut aussi amener les filtres à l’auto-oscillation.

Un autre switch 3 positions (‘Expand’), lui aussi capable de trois nuances (un peu, beaucoup, passionnément), détermine la modulation du filtre par la pente de l’enveloppe. Très précieuse et expressive fonction, en particulier avec un peu ou beaucoup de résonnance sur les filtres!

VCAs et enveloppes
Fader ‘Attack’ (fast/slow)
Fader ‘Sustain’ (percussion/singing)
Switch ‘Short/long’
Switch ‘Hold/sustain’
Comme sur les 700, on a une enveloppe à deux segments, que l’on pourrait appeler ‘Attaque’ et ‘Sustain’, selon la terminologie traditionnelle, pour se référer à une tradition ‘postérieure’ à la sortie des 700, 770 et 800.
Ces deux contrôles sont assortis de deux switches 3 positions qui permettent de nuancer des deux paramètres, au point d’avoir des enveloppes en fait aussi souples et expressives que les sacro-saintes enveloppes à 4 segments apparues un peu plus tard.
Ces enveloppes sont extrèmement rapides, et permettent des sons percussifs d’une grosse grosse patate!

VCOs
Sélecteur tessiture (64’/2′)
Sélecteur forme d’onde (TRI, SQR, SAW, PULSE, CHORUS=PWM, NOISE (vco1=pink, vco2=white))
Potar mix sub’Osc
Sélecteur tessiture sub’Osc (RING MOD, 32′, 16′, 8′, 4′, 2′)

On notera l’étendue exceptionnelle de la tessiture de l’oscillateur principal!
Cette machine permet aussi l’emploi simultanné de bruit blanc et de bruit rose avec filtrage indépendant LPF-HPF, ce qui n’est d’ordinaire guère possible que sur de gros modulaires.
Oui vous avez bien vu: chaque canal dispose de deux oscillateurs mixables. En mono on a donc du très très très gros son à 4 oscillateurs, traités par ces fabuleux filtres à diodes: Ca décoiffe!
On n’a pas le choix de l’onde sur le deuxième oscillateur: c’est RING MOD ou SAW.

MODULATIONS
Switch ‘Vibrato’
Switch ‘Bend’
Switch ‘Portamento’
…Et plusieurs faders associés:

Ces trois switches sont en position OFF au centre.
Notons tout d’abord l’absence bizarre de modulation sur les filtres…Mais comment se fesses, commencera-t-on par déplorer? Je rassure tout de suite les benêts pessimistes: il y a une astuce!
-Switch ‘Vibrato’: en position haute (‘normal’), on a un vibrato standard avec une amplitude et une fréquence prédéfinies.
En position basse (‘delay’), on a accès à des variations (fréquence (‘speed’), amplitude (‘depth’), et retard (‘delay’), ajustables grâce aux trois faders correspondants.
Notons que le fader ‘Speed’ détermine aussi la fréqence du PWM quand le sélecteur de forme d’onde est sur ‘CHORUS’.

-Switch ‘Bend’: Il s’agit en fait d’un ‘auto-bend’; le pitch est modulé par la forme de l’enveloppe.
En position haute, le pitch démarre une octave plus haut, et descend à la note normale après le temps déterminé par le fader DELAY à la vitesse déterminée par le fader BEND.
En position basse, le bend démarre une octave en-dessous.

-Switch ‘Portamento’: En position haute (‘Fixed’), on a un effet glissé du pitch entre deux notes consécutives jouées au clavier, selon un temps moyen prédéterminé.
En position basse (‘Variable’), le temps du glissé est déterminé par le fader PORTAMENTO.

Signalons l’excellence du design de cette machine de scène: tous ces contrôles sont très aisément accessibles et manipulables avec 4 doigts d’une main tandis que le dernier joue sur le clavier. Comme le clavier est duophonique, on peut avoir théoriquement en permanence un doigt de chaque main occupé au clavier tandis que les 8 autres manipulent les contrôles tout près au-dessus.
Programmation, modification des sons en temps réel et tandis qu’on joue. Ceci fait du 800DV un instrument d’une souplesse incomparable. On peut faire du ‘morphing’ en continu!

REPEAT
Fader ‘Speed’
Fader ‘largeur d’impulsion’
Sélecteur ‘Mode’

Et voici l’astuce: Il s’agit d’un troisième LFO (en plus, donc, des deux qui modulent le vibrato et le PWM sur chaque canal), dont la fonction est de trigguer les enveloppes.
Conjointement avec le switch EXPAND, qui module le filtre par l’enveloppe, ceci permet une modulation cyclique des VCFs.
On détermine la vitesse d’impulsion grâce au fader ‘Speed’, tandis qu’on détermine la ‘largeur’, c’est à dire la durée de chaque impulsion grâce au fader voisin.
Le sélecteur ‘Mode’ permet de
-ne rien trigguer (OFF)
-trigguer seulement l’enveloppe du canal 1 (A)
-trigguer seulement l’enveloppe du canal 2 (B)
-trigguer ensemble les enveloppes des deux canaux, selon le même intervalle (déterminé par le fader ‘largeur d’impulsion’)
-trigguer ensemble les enveloppes des deux canaux, selon deux intervalles différents inverses l’un de l’autre (déterminés par le fader ‘largeur d’impulsion’)
-trigguer alternativement les enveloppes des deux canaux.
Ce module permet des modulations extrèmement complexes sur les VCAs et les VCFs, à combiner pour encore plus de complexité, avec le jeu duophonique au clavier.

KEY TRANSPOSE
Switch 2 positions (A-B)
Switch 2 positions (C-D)
Ce module gère la façon dont le clavier fonctionne:
-les deux switches sont en position haute (A-C): clavier monophonique. Les deux canaux sont déclenchés en même temps.
-le switch gauche en position basse, l’autre en position haute (B-C): Mode duophonique 1: Quand UNE touche est jouée, le canal 1 est déclenché. Ensuite, une autre touche située à GAUCHE de la première déclenche le canal 2.
-le switch gauche en position haute, l’autre en position basse (A-D): Mode duophonique 2: Quand UNE touche est jouée, le canal 2 est déclenché. Ensuite, une autre touche située à DROITE de la première déclenche le canal 1.
-Le switch gauche en position basse et l’autre aussi (B-D): Mode duophonique 3: Les canaux 1 et 2 sont déclenchés simultannément seulement lorsque deux touches sont enfoncées en même temps.

CONNECTIQUE

De série, le 800DV comporte 6 jacks sur le panneau arrière:
-Un jack audio OUT pour le canal 1, qui fait office de sortie groupée pour les deux canaux lors d’une connection MONO.
-Un jack audio OUT pour le canal 2.
-4 jacks destinés à insérer des effets: un IN et un OUT pour chaque canal.

Mon exemplaire a été modifié par ‘Angel Freddy’, un bricolo qui sévissait dans les années 70, et comporte des jacks TRIG IN et CV IN pour chaque canal, ce qui permet d’asservir le synthé à un autre ou a un séquenceur analogique par exemple.
Je suppose que ça permet aussi de l’utiliser en pilotage midi via une interface appropriée, sacrilège que je ne commettrai jamais!
Angel Freddy a aussi rajouté les deux petits interrupteurs qu’on voit sur la photo, à droite du panneau de contrôle, qui permettent de déconnecter les modules du clavier, ainsi que d’asservir la connectique du canal 2 à celle du canal 1 (si l’on souhaite faire jouer les deux canaux à l’unisson).
Pour signer son méfait, il a apposé à l’arrière de l’appareil une plaque chromée et gravée à son nom du plus bel effet!

Juste un petit bémol, pour tempérer l’impression générale hyper enthousiaste que me procure cet instrument magnifique: les sélecteurs sont trop durs pour être manipulés avec juste deux doigts.
Ce qui ne fait que renforcer par ailleurs le parfum de robustesse qui s’exhale de cette machine!
Le 800DV a été utilisé entre autres par Kitaro et par The Cure sur l’album ‘Pornography’. C’est la grosse basse grondante et grenue, soutenue par un Moog Taurus qui amène une composante plus ronde, qui démarre le morceau ‘Cold’ et le mène jusqu’à la fin.
Une video:
//www.youtube.com/watch?v=hj1zkBZCyZQ

Un morceau fait en une prise live avec un 800DV et une BàR Viscount R64:
//www.noise-is-beautiful.com/mp3/ABSENT.mp3
J’ai utilisé au début le Ring Modulator du VCO1 sans retenue!

Super-merci à Push, qui a chopé pour moi cet été (même s’il s’en mord les doigts aujourd’hui…) grâce à ses talents de ‘négociateur’ hors pair, cette merveille dans un magasin de zique en Suisse (chuis en Ardèche)!!!
C’est son joli divan rayé qu’on voit sur la photo…
Actuellement il est ici:

Enfin, ça nous a fait l’occasion d’une rencontre, moment fort agréable, bientôt renouvelé dans l’autre sens!
A l’époque du fameux catalogue KORG n&b 4 pages, le 800DV était encore en fabrication et en vente (1978). Déjà mythique grâce à ses qualités exceptionnelles, ce synthé était bien entendu hors de portée de ma bourse d’adolescent boutonneux…

Ce que j’ai pu baver dessus avant de me rabattre sur mon premier synthé (MS20)!!!

 

Fiche créée par Oryjen

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